Espéranto-Vendée : un pari gagné

Publié le vendredi 6 octobre 2006 , mis a jour le samedi 7 octobre 2006

HISTORIQUE
1887
 : naissance de l’espéranto à Varsovie
1903 : premiers pas en Vendée. Le pionnier en a été Léon Ballereau, architecte à Luçon, qui l’a appris avec sa famille.
1996 : naissance de l’association départementale d’espéranto, « espéranto-Vendée ». Annonce au « Journal Officiel » du 16 octobre.
1999
 : M.Jacques Auxiette inaugure le « Rond-point Zamenhof » (prés de la Courtaisière)
2003 : centième anniversaire de la naissance en Vendée, fêté avec l’aimable soutien de la ville de Luçon.
2004, l’année du bicentenaire de La Roche-sur-Yon, a été marquée par l’accueil du congrès de l’association SAT-Amikaro dont la revue est lue dans une quarantaine de pays et dont le siège est à Paris. Avec 233 participants de 8 pays, il s’est situé dans la bonne moyenne de fréquentation.
2006 : 10 ans de l’association, fêté en musique et dans la bonne humeur autour d’un chanteur-musicien, JOMO (voir fiche biographique de JOMO), sorte de saltimbanque des langues, et avec la participation de La Soulère pour animer un repas réunionnais... Mélange des genres et des cultures, dans la gaieté, voilà ce que veut être la dynamique de l’espéranto en Vendée !!!

ESPERANTO ET VOYAGE : un pari gagné
Depuis sa fondation, des adhérents ont fait usage de la Langue Internationale (ainsi désignée à l’origine) pour des échanges épistolaires, réticulaires et pour des voyages à travers l’Europe et le monde. Cette langue a répondu à leur attente.
1997- 2002 : Un jeune couple, Gudule Le Pichon et Laurent Cuenot, a ajouté l’espéranto à son bagage linguistique pour se lancer dans un tour d’Europe en roulotte. Partis du Poiroux en 1997 avec leur petite fille Lola, âgée de six mois, ils sont revenus avec Romain, un second enfant né en Grèce, ceci après s’être mariés en République tchèque. Leur voyage, du fait de l’accueil chaleureux dans 14 pays, a duré 5 ans et demi au lieu des quatre envisagés. Leur retour s’est fait au Rond-point du Dr Zamenhof
2001 – 2002 : Le Rond-point du Dr Zamenhof est devenu le point de départ et d’arrivée de deux autres jeunes adhérents d’Espéranto-Vendée, Rachel Prual et David Cholet. Ils ont effectué un tour du monde de 23 mois et de 36 000 km à travers 36 pays. Leur récit peut être lu sur http://mondepouce.free.fr/NOUS.html .
2005 : participation de 5 espérantistes de l’association au congrès international à Vilnius, durant une semaine : 2344 participants de 62 pays
2005 : semaine de l’Europe avec l’accueil de Zef Jégard, qui a parcouru 13 850 km de Brest à Vladivostok en moins de 66 jours et qui a retransmis son voyage lors d’une soirée à la médiathèque. Ce fut l’occasion de créer du lien avec d’autres voyageurs, lors d’un débat extrêmement intéressant sur le thème « voyager, une autre manière de traduire », animé par les référents de l’atelier d’écriture du Manège
2006 : à nouveau, participation au congrès de 3 personnes de Vendée à Florence en Italie. Cette fois 2209 congressistes de 62 pays. Ces congrès se déroulent SANS TRADUCTEURS bien évidemment, avec en plus, une place réservée aux enfants.
2005, 2006 : différents voyages privés ont amené des membres de l’association à rencontrer des familles en Roumanie, au Japon et en Chine.
Il s’agit là d’expériences convaincantes de la valeur de la langue en terme d’ouverture au monde, et d’échange, voir de lien avec l’autre. Tous ceux qui l’ont pratiqué, ont pu voir en l’espéranto un vrai sésame.
ACTIVITES DE L’ASSOCIATION
Depuis le début, deux activités principales
1 ) Cours tout niveau
Les premiers cours oraux ont commencé à La Roche-sur-Yon. Il y en a eu aussi à Fontenay-le-Comte, Saint Philbert-de-Bouaine, La Tranche-sur-Mer puis à Beaulieu-sous-la-Roche. Un autre pourrait être lancé à Saint Michel-en-L’Herm. Deux grands stages d’apprentissage et de perfectionnement, avec près de cent participants, ont été organisés conjointement par Espéranto-44 et Espéranto-Vendée à Saint Philbert-de-Bouaine dans les premières années d’existence de l’association.
Deux expériences d’enseignement ont été réalisées :
* dans le cadre d’un module d’initiative locale de 40 h (MIL) en 1999 et 2000 au lycée Nature
* une autre au Lycée Pierre Mendès-France, dans le cadre d’Actions professionnelles appliquées. Le but du projet était de réaliser un sondage dans des établissements d’enseignement secondaire et supérieur de La Roche-sur-Yon. Il est apparu que, sur 411 lycéens et étudiants interrogés, 200 (49%) estimaient souhaitable que l’espéranto soit proposé à titre facultatif, voire en option, au baccalauréat alors que 115 (28%) pensaient que non. Compte tenu du peu d’information sur la question, il s’agit-là d’un résultat digne d’attention.
* Des cours d’initiation se sont déroulés avec succès au groupe scolaire Montjoie.
NOUVEAU : cours par regroupement à la journée, sur 6 samedis étalés du 18 novembre au 21 avril sur un horaire allant de 9h 30 à 12h 30 et de 13h 30 à 16h 30. Il s’agit de cours destinés aux personnes qui ont des bases d’espéranto. Celles-ci peuvent être acquises au moyen d’un CD-ROM ou d’un DVD, par Internet ou par des stages tels que ceux d’Espéranto-44, l’association voisine.
2) Information sur la langue espéranto, via un site Internet (en cours de rénovation) et un journal bimensuel « la lettre d’Espéranto-Vendée ».
D’une manière générale : participation à des forums associatifs à La Roche, Fontenay, La Tranche, St Michel-en-l’Herm, aux Enfantaisies, à la Fête du livre Jeunesse d’Aizenay, aux Latitudes, à la Semaine de l’Europe, à la Semaine de la Francophonie, à la Semaine de la Solidarité Internationale, aux Journées des Verts à St Jean-de-Monts, et aussi à des manifestations, du fait que ce qui est humain n’est pas étranger, à l’espéranto par exemple contre la guerre d’Irak, en 2003.
Le nombre de personnes qui sont informées plus ou moins régulièrement après avoir manifesté de l’intérêt est d’environ 300 en Vendée, dont 43 par Internet. Le nombre d’adhérents, qui était d’une soixantaine au départ, reste stable, autour de 70-80. Il n’a guère progressé en quantité mais nettement en qualité, c’est-à-dire par l’usage de la langue.
Le développement d’Internet et de nouveaux supports récents de documentation et d’information, notamment le DVD “Espéranto Elektronike“ et le film “Gerda malaperis“, va procurer à toute personne intéressée de nouvelles possibilités d’apprentissage chez soi, seul ou en famille.

POUR EN SAVOIR PLUS SUR L’ESPERANTO
Au moment où la question de “commerce équitable“ est souvent évoquée, celle d’une communication linguistique équitable ne l’est que très rarement. Lancer une association d’espéranto en 1996, au moment où l’on assénait déjà que le problème de communication linguistique internationale était définitivement résolu par l’anglais, c’était un pari audacieux dans un contexte où une alternative paraissait, de plus, inimaginable. Même s’il peut être un passe-temps agréable, l’espéranto a été, et est encore, trop souvent considéré, par erreur, comme tel. Dès ses origines, il visait à favoriser les échanges internationaux, à les faciliter, à encourager les peuples sur la voie de l’estime réciproque et d’une coopération constructive. Preuve est faite qu’il fonctionne de façon satisfaisante, ce qui explique l’essor que lui donne la propagation d’Internet dont la popularisation a commencé à s’accélérer, en France, à peu près à la même époque.
Quelques faits sur la situation actuelle de l’espéranto dans le monde
Parmi les 229 langues de l’encyclopédie réticulaire “Wikipedia“, l’espéranto se classe aujourd’hui en quinzième position avec environ 60 000 articles : http://eo.wikipedia.org/

Publiés aussi en latin sous la présidence finlandaise de l’Union européenne, les communiqués hebdomadaires sont diffusés aussi en espéranto depuis le 28 août 2006 : http://conspectus.wordpress.com/
Commandé par le Haut Conseil de l’évaluation de l’école, publié en octobre 2005 sous le titre “L’enseignement des langues étrangères comme politique publique“, le rapport Grin considère l’espéranto comme une proposition digne d’être prise en considération entre trois scénarios possibles :
http://www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/054000678/index.shtml
Le professeur Robert Phillipson, un ancien du British Council qui a dénoncé en 1992 la manipulation politique visant à imposer l’anglais comme langue internationale (« Linguistic Imperialism », Oxford University Press), estime que l’espéranto peut être pris en considération pour la solution des problèmes linguistique de l’Union européenne dans son dernier ouvrage “English-Only Europe ? : Challenging Language Policy“ (Routledge, Londres, 2003 : www.swany.co.jp/phillipson/img/lefigaro.pdf
Des associations d’espéranto continuent à être fondées à travers le monde, les plus récentes ont vu le jour aux Philippines, au Tchad, en Angola. Les pays anglophones ne sont pas en reste.
En Grande-Bretagne, le programme “Springboard... to languages“ vise à faciliter l’apprentissage des langues étrangères avec l’espéranto comme stimulateur et enseignement préparatoire : http://www.springboard2languages.org/home.htm
Aux États-Unis, une proposition a été émise au sein d’Esperanto-USA à l’attention des créateurs de blogs du monde entier afin qu’ils signalent la date du 15 décembre comme “Esperanto-day/Esperanto-Tago”, c’est-à-dire Journée de l’espéranto, pour commémorer la naissance du Dr Zamenhof : http://www.esperanto-usa.org/

Clemenceau et l’espéranto
Fondateur et rédacteur en chef de “L’Homme Enchaîné“, Georges Clemenceau n’ignorait ni qui était le Dr Zamenhof ni l’existence de l’espéranto. Dans le numéro du 18 avril 1917, le lendemain de la mort du Dr Zamenhof, il avait tenu à exprimer le sentiment qu’il éprouvait pour l’homme à qui l’humanité doit l’existence de la langue la plus équitable qui soit : "Ne laissons pas partir sans un adieu cet homme de bonne foi, de volonté et d’apostolat... Il passa sa vie à bâtir de toutes pièces une langue internationale, l’Esperanto, qui a peut-être des chances, même après la mort de son créateur, de rester une oeuvre vraiment vivante.
Je m’empresse de dire que je n’ai point lu le fameux Fundamento de Esperanto du Dr Zamenhof, ni les traductions qu’il a faites des oeuvres de Molière, Shakespeare, Goethe ou Gogol. Mais je suis prêt à reconnaître que l’Esperanto a des qualités de logique, de clarté, de simplicité et surtout de facilité, qui donnent de la valeur et de la force...
Son vocabulaire, bien que restreint, est assez riche et assez nuancé pour s’assouplir à la rude discipline de la traduction des chefs-d’oeuvre de toutes les littératures étrangères ; il est assez souple pour exprimer toutes les pensées humaines."
Comme il l’avait reconnu, ses connaissances en la matière comportaient effectivement des lacunes. En effet, c’est erreur de dire, par exemple, que l’espéranto a été créé "de toutes pièces", comme allait le démontrer l’année suivante le très éminent Antoine Meillet, professeur au Collège de France, dans son ouvrage “Les langues de l’Europe nouvelle“, en soulignant qu’il n’était “ni absurde ni excessif d’essayer de dégager des langues européennes l’élément commun qu’elles comprennent pour en faire une langue internationale.
L’expression " vocabulaire restreint" ne tient pas compte de la richesse combinatoire de l’espéranto qui l’apparente aux langues agglutinantes et lui donne une grande richesse en ressources. De l’avis du professeur Umberto Eco : “Du point de vue linguistique, cette langue suit vraiment des critères d’économie et d’efficacité qui sont admirables.“ Par ailleurs, le vocabulaire s’est beaucoup enrichi entre la parution du premier manuel, en 1887, jusqu’à l’époque où il a prononcé ces mots, et plus encore depuis lors jusqu’à nos jours.
Clemenceau avait par ailleurs accordé, alors qu’il n’était pas encore premier ministre, un entretien à Edmond Privat, l’une des plus grandes figures de l’espéranto, à propos de l’indépendance de la Pologne. Clemenceau, qui détestait la bureaucratie française et ne manquait pas une occasion pour ironiser sur elle, l’accueillit avec bienveillance et l’encouragea ainsi : "Vous avez raison. La résurrection de la Pologne est un idéal français ancien. Elle aura lieu, croyez-moi, et j’aiderai un jeune homme courageux, mais vous êtes Suisse, et les insectes, dans la bureaucratie, ont les moyens de vous réduire au silence. Mon conseil est que vous alliez à Genève et que, de là, vous poursuiviez votre plaidoyer pour une cause totalement juste et digne de soutien. De là, vous pourrez vous moquer en toute liberté des insectes de nos offices bureaucratiques et défendre une cause juste que la France elle-même approuvera lorsque le moment viendra."
Clemenceau ne s’était pas trompé sur l’avenir de la Pologne et sur le fait que l’espéranto soit aujourd’hui une œuvre vivante.